La responsabilité pénale des personnes morales, un sujet complexe et controversé affirme Yassine Yakouti

La responsabilité pénale des personnes morales est une notion qui suscite de nombreux débats juridiques et sociétaux. Il s’agit de savoir si une entité collective, dotée de la personnalité juridique, peut être tenue pour responsable des infractions commises par ses organes ou représentants, et si oui, dans quelles conditions et avec quelles conséquences.

Qu’est-ce que la responsabilité pénale des personnes morales ? Les explications de Yassine Yakouti

La responsabilité pénale des personnes morales est le fait pour une personne morale, c’est-à-dire une entité dotée de la personnalité juridique, d’être déclarée coupable d’une infraction et de se voir infliger une sanction pénale, explique Yassine Yakouti. Cette responsabilité est prévue par l’article 121-2 du Code pénal, qui dispose que :

Les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Il s’agit d’un principe relativement récent en droit français, puisqu’il a été introduit par la loi du 13 mai 1994. Auparavant, seules les personnes physiques pouvaient être pénalement responsables, selon le principe selon lequel « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait » (article 121-1 du Code pénal).

La responsabilité pénale des personnes morales repose sur deux conditions cumulatives : il faut qu’une infraction ait été commise pour le compte de la personne morale, et qu’elle ait été commise par un organe ou un représentant de celle-ci, note Yassine Yakouti.

Voici une vidéo relatant ces faits :

L’infraction commise pour le compte de la personne morale

La première condition implique que l’infraction ait été commise dans l’intérêt ou pour le bénéfice de la personne morale. Il ne suffit pas que l’infraction ait été commise dans le cadre de l’activité de la personne morale, il faut qu’elle ait eu pour but ou pour effet de favoriser ses intérêts propres. Par exemple, une société peut être pénalement responsable si elle a fraudé le fisc ou si elle a versé des pots-de-vin pour obtenir un marché public, explique Yassine Yakouti.

En revanche, si l’infraction a été commise à titre personnel par un organe ou un représentant de la personne morale, sans lien avec ses fonctions ou son mandat, la responsabilité pénale de la personne morale n’est pas engagée. Par exemple, une société n’est pas pénalement responsable si son dirigeant a commis un vol ou une agression en dehors de ses heures de travail.

L’infraction commise par un organe ou un représentant de la personne morale

La deuxième condition implique que l’infraction ait été commise par une personne physique qui agit au nom et pour le compte de la personne morale. Il peut s’agir d’un organe de la personne morale, c’est-à-dire d’une personne qui détient un pouvoir de décision ou de direction au sein de celle-ci (par exemple, le président du conseil d’administration ou le gérant d’une société). Il peut aussi s’agir d’un représentant de la personne morale, c’est-à-dire d’une personne qui agit sous l’autorité ou le contrôle d’un organe (par exemple, un salarié ou un mandataire).

Il n’est pas nécessaire que l’organe ou le représentant soit identifié nominativement. Il suffit que son existence soit établie et qu’il soit démontré qu’il a agi pour le compte de la personne morale, indique Yassine Yakouti. Par exemple, une société peut être pénalement responsable si un de ses salariés, non identifié, a commis une infraction dans le cadre de son travail.

Comment s’applique la responsabilité pénale des personnes morales aux infractions non intentionnelles ?

La responsabilité pénale des personnes morales concerne toutes les infractions prévues par le Code pénal ou les lois spéciales, qu’elles soient intentionnelles ou non. Les infractions non intentionnelles sont celles qui sont commises sans volonté de causer un dommage, mais par imprudence, négligence ou inobservation des règles de prudence ou de sécurité. Parmi ces infractions, on peut citer les homicides ou blessures involontaires, qui peuvent survenir dans le cadre de l’activité des entreprises.

La responsabilité pénale des personnes morales pour les infractions non intentionnelles repose sur les mêmes conditions que pour les infractions intentionnelles : il faut qu’une infraction ait été commise pour le compte de la personne morale, et qu’elle ait été commise par un organe ou un représentant de celle-ci, indique Yassine Yakouti. Toutefois, il existe une spécificité pour les infractions non intentionnelles : il faut que la faute commise par l’organe ou le représentant soit qualifiée.

La faute qualifiée

La faute qualifiée est une faute d’une gravité particulière, qui dépasse le simple manquement aux règles de prudence ou de sécurité. Il s’agit d’une faute caractérisée, c’est-à-dire d’une faute qui expose autrui à un risque d’une particulière gravité que l’auteur ne pouvait ignorer, ou d’une faute délibérée, c’est-à-dire d’une faute qui consiste à violer sciemment une règle de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

La notion de faute qualifiée a été introduite par la loi du 10 juillet 2000, qui a modifié l’article 121-3 du Code pénal. Cette loi visait à limiter la responsabilité pénale des personnes morales pour les infractions non intentionnelles, en exigeant un niveau de faute plus élevé que pour les personnes physiques. En effet, les personnes physiques peuvent être pénalement responsables pour les infractions non intentionnelles dès lors qu’elles ont commis une simple faute d’imprudence, de négligence ou d’inobservation des règles de prudence ou de sécurité.

L’exemple des homicides ou blessures involontaires

Les homicides ou blessures involontaires sont définis par l’article 221-6 du Code pénal comme le fait de causer la mort ou une blessure à autrui par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.

Pour que la responsabilité pénale des personnes morales soit engagée pour ces infractions, il faut donc que :

  • la mort ou la blessure ait été causée pour le compte de la personne morale ;
  • la mort ou la blessure ait été causée par un organe ou un représentant de la personne morale ;
  • l’organe ou le représentant ait commis une faute qualifiée (caractérisée ou délibérée).

Par exemple, une société peut être pénalement responsable si elle a causé la mort d’un client en lui vendant un produit défectueux, si ce produit a été fabriqué ou commercialisé par un organe ou un représentant de la société, et si cet organe ou ce représentant a sciemment violé les normes de sécurité applicables au produit.

Quelles sont les limites et les critiques de la responsabilité pénale des personnes morales ?

La responsabilité pénale des personnes morales est un régime juridique qui présente des avantages et des inconvénients. Il permet notamment de sanctionner efficacement la délinquance économique et environnementale, qui implique souvent des entités collectives. Il permet aussi de responsabiliser les personnes morales et de les inciter à prévenir les risques liés à leur activité. Toutefois, il soulève aussi des difficultés et des controverses.

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